La Cour administrative d’appel de Versailles vient de donner raison à l’État en jugeant, dans un récent arrêt, qu’une commune ne peut moduler le régime indemnitaire des fonctionnaires, le Rifseep, en fonction de l’assiduité de ses agents. Principe de parité oblige...
L’année 2020 aura été riche en jurisprudence concernant le Rifseep, le régime indemnitaire des fonctionnaires tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel. Par un arrêt de novembre dernier, la cour administrative d’appel de Nancy avait pour la première fois ouvert la voie à une appréhension plus libérale du principe de parité entre la fonction publique d’État et la territoriale. L’État se pourvoit toutefois en cassation [cliquez ici pour consulter notre article sur le sujet].
Quelque temps auparavant, la cour administrative d’appel de Versailles a rendu un arrêt tout aussi important. Passé inaperçu et tout juste repéré par le cabinet Landot et associés, cet arrêt est relatif à la modulation de ce Rifseep en fonction de l’assiduité des agents. Précisément, il s’agit de la modulation du deuxième volet du régime, le complément indemnitaire annuel (CIA), le premier volet étant, pour rappel, l’indemnité de fonctions de sujétions et d’expertise (IFSE).
Prime à l’assiduité
L’affaire que la cour avait à juger concernait un recours du préfet du Val-d’Oise qui avait fait appel d’un jugement d’octobre 2018 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Jugement par lequel ce tribunal avait rejeté la demande de ce préfet d’annuler une délibération du conseil municipal d’Argenteuil par laquelle la commune avait prévu une “part annuelle” du CIA “d’un montant maximal de 500 euros bruts dédiée à la valorisation de l’assiduité”.
Depuis cette délibération de mars 2018, les agents de la commune ne comptant aucune absence dans l’année se voient ainsi attribuer 100 % de cette somme. Ceux qui comptent une journée d’absence en reçoivent 75 %, ceux qui comptent 2 journées d’absence, 50 % et ceux qui comptent 3 journées d’absence, 25 %. Toute absence supérieure à 3 jours entraîne quant à elle la suppression du versement de cette part du complément indemnitaire.
À l’appui de son recours en appel, le préfet du Val-d’Oise soutenait que ladite délibération instituait “un critère unique lié exclusivement à l’assiduité qui n’existe pas pour la fonction publique de l’État” et était ainsi contraire au principe de parité entre l’État et la territoriale. C’est au préfet que la cour administrative d’appel de Versailles vient de donner raison.
Régime plus favorable aux territoriaux
“En adoptant ce critère d’absence”, souligne-t-elle ainsi dans son arrêt, la commune d’Argenteuil “doit être regardée comme ayant instauré une prime dont ne bénéficient pas les fonctionnaires de l’État et méconnu, de ce fait, les dispositions” réglementaires relatives à ce principe de parité. “Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d’administration des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l’État exerçant des fonctions équivalentes”, stipulent précisément ces dispositions.
Par suite, selon la cour administrative d’appel, le préfet du Val-d’Oise est “fondé à soutenir” que la part du CIA de la commune d’Argenteuil dédiée à la valorisation de l’assiduité est illégale et que “c’est à tort que” le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en 2018.
“Si aucune disposition législative ou réglementaire ne fixe les conditions de versement des primes et indemnités en cas d’indisponibilité physique des fonctionnaires territoriaux, il ressort des textes que l’organe délibérant peut décider de minorer une partie du régime indemnitaire en cas d’absence de l’agent, critère pris en compte pour évaluer l’engagement professionnel de l’agent, et ainsi déterminer le montant du CIA”, estimait le tribunal dans son jugement. Faux, donc, selon la cour administrative d’appel de Versailles, qui vient d’annuler ce jugement ainsi que la délibération de la commune d’Argenteuil [cliquez ici pour consulter son arrêt].
9 février 2021
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