Protection fonctionnelle en cas de risque avéré d’atteinte volontaire à l’intégrité physique


Dans une décision du 7 juin 2024, le Conseil d’Etat reconnaît qu’un agent public peut bénéficier de la protection fonctionnelle en cas de risque avéré d’une atteinte volontaire à son intégrité physique. 

Lors de l’attentat terroriste commis en octobre 2019 dans les locaux de la préfecture de Paris, une adjointe administrative était présente dans son bureau. Elle a sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle afin de pouvoir se porter partie civile dans le cadre d’une plainte contre X pour association de malfaiteurs terroristes. Mais le ministre de l’intérieur ayant rejeté sa demande, elle a alors saisi la juridiction administrative ; en première instance la décision ministérielle de rejet a été annulée. C’est alors le ministre qui a alors fait appel, puis formé un pourvoi contre l’arrêt de la CAA de Paris qui a rejeté sa demande.

Obligation de protection 

S’appuyant sur les dispositions législatives en vigueur, la Haute juridiction a rappelé l’obligation de protection à la charge des collectivités territoriales au profit des fonctionnaires victimes d’attaques à l’occasion ou du fait de leurs fonctions, sans qu’une faute personnelle puisse leur être imputée. Il ne peut être dérogé à cette obligation que pour des motifs d’intérêt général et sous le contrôle du juge.

A l’occasion de cette affaire, les juges ont rappelé que cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l’agent concerné est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu’il a subis. Cette protection n’est cependant due que lorsque les agissements en cause visent l’agent concerné à raison de sa qualité d’agent public.

En l’espèce, la question est de savoir si l’agent, présente lors de l’attentat, pouvait bénéficier de la protection fonctionnelle. Tandis que l’attaque terroriste commise dans les locaux de la préfecture de police avait pour but de tuer des agents préfectoraux à raison de leur qualité d’agent public, l’agent est sortie de son bureau après avoir entendu des cris et des appels à l’aide de ses collègues: elle a vu l’auteur de l’attentat dans le couloir muni d’un couteau ensanglanté; celui-ci s’est ensuite retourné et s’est retrouvé face à elle; elle s’est s’est alors réfugiée dans son bureau en s’y enfermant.

En appel, de manière souveraine, la Cour avait estimé que l’intéressée a ainsi été directement et personnellement exposée à un risque avéré de subir une atteinte volontaire à son intégrité physique. Le Conseil d’Etat vient de confirmer l’analyse des juges d’appel selon laquelle l’agent remplissait les conditions d’octroi de la protection fonctionnelle. Ainsi, cette obligation de protection s’applique également lorsque l’agent est directement et personnellement exposé à un risque avéré d’atteinte volontaire à son intégrité physique ou à sa vie en raison de sa qualité d’agent public.

Le pourvoi du ministre de l’intérieur a donc été rejeté.

RÉFÉRENCES

10 septembre 2024

Sophie Soykurt

pour La Gazette des Communes