Le tribunal administratif de Poitiers vient d’annuler le refus opposé par un centre pénitentiaire à la demande de congé de paternité présentée par l’un de ses fonctionnaires. L’administration mettait en avant des nécessités de service pour justifier son refus. Une pratique illégale selon les juges.
Dans la fonction publique, l’octroi d’un congé de paternité ne peut être conditionné aux nécessités de service. C’est ce que vient d’indiquer le tribunal administratif de Poitiers dans un jugement du 13 mars relatif au cas d’un fonctionnaire de la pénitentiaire auquel l’administration avait refusé de prendre son congé de paternité.
Surveillant au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne, dans la Vienne, cet agent avait fait part à son administration de son souhait de bénéficier d’un congé de paternité pour la naissance à venir de son enfant. Il avait pris la première partie de ce congé de 25 jours calendaires – soit 4 jours –, juste après la naissance de son fils en mars 2022. Et souhaitait prendre ses 21 jours restants du 2 au 22 juillet 2022.
Une demande qui avait été rejetée par son administration au motif “que la période estivale n’est pas propice à la pose d’un congé de paternité” compte tenu, notamment, des autres congés programmés sur cette même période. Son centre pénitentiaire l’avait ensuite invité à proposer d’autres dates en dehors de cette période. Une décision dont l’agent a décidé de demander l’annulation. Il réclamait en outre la condamnation de l’État à l’indemniser du préjudice qu’il estimait avoir subi du fait de ce refus de lui accorder son congé paternité aux dates choisies. Et les juges lui ont donné raison.
Préjudice moral
“Ni le principe du congé de paternité ni les dates auxquelles la seconde période de ce congé est prise ne sont soumis à l’accord préalable du chef de service”, souligne en effet le tribunal administratif sur la base des dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Le législateur, poursuit-il, n’a effectivement “pas entendu conditionner l’octroi d’un tel congé ou des dates auxquelles il est pris aux nécessités du service”. Aussi, développent les juges, le chef de service peut “seulement” opposer au fonctionnaire concerné la méconnaissance du délai d’un mois dont il dispose pour l’informer des dates de son congé. Un délai qui a pour objet de permettre à l’administration de prendre les mesures organisationnelles nécessaires pour pallier l’absence à venir de ce fonctionnaire.
Or, dans l’affaire en question, le requérant a respecté le délai d’un mois précité. “Dans ces conditions, la direction du centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne ne pouvait légalement se fonder sur les nécessités de service pour lui refuser la prise de son congé de paternité et lui demander de formuler une nouvelle demande en dehors de la période estivale”, conclut le tribunal, qui annule donc le refus opposé par l’administration.
Cette décision étant entachée “d’une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l’État”, les juges condamnent également l’État à verser 500 euros au requérant au titre du préjudice moral qu’il a subi
3 avril 2025
Bastien Scordia
pour ACTEURS PUBLICS