Seuls les supérieurs hiérarchiques directs des fonctionnaires peuvent conduire les entretiens professionnels, vient d’indiquer le tribunal administratif de Melun en annulant le compte rendu d’entretien professionnel d’une fonctionnaire qui avait été mené par sa supérieure hiérarchique et par le maire.

L’évaluation professionnelle des fonctionnaires doit respecter un certain formalisme. C’est ce que vient de rappeler le tribunal administratif de Melun dans un jugement du 19 septembre à propos du cas d’une fonctionnaire territoriale qui contestait l’évaluation faite par sa hiérarchie. Plus précisément, cette agente territoriale spécialisée des écoles maternelles (Atsem) au sein d’une commune réclamait l’annulation du compte rendu de son évaluation professionnelle au titre de l’année 2021.

La requérante estimait que cette évaluation avait été réalisée dans des “conditions irrégulières” puisqu’elle avait été reçue par ses deux supérieurs hiérarchiques pour la conduite de son entretien professionnel et que ceux-ci avaient, tous deux, signé le compte rendu de cet entretien. Des pratiques qui, selon cette fonctionnaire, contreviendraient aux dispositions législatives et réglementaires sur l’évaluation des fonctionnaires, qui réservent la conduite desdits entretiens au seul supérieur hiérarchique direct. Les juges en ont eu la même lecture.

Présence du maire à l’entretien

Selon ces dispositions, en effet, “il incombe au seul supérieur hiérarchique direct de l’agent de conduire son entretien professionnel puis d’en établir et d'en signer le compte-rendu”, rappelle le tribunal administratif de Melun. Il revient ensuite à l’autorité hiérarchique de “viser” ce compte-rendu et, “si elle l’estime utile”, de formuler ses observations préalablement à la notification définitive de l’évaluation au fonctionnaire intéressé.  

Dans l’affaire en question, lors de son entretien professionnel, la requérante avait été reçue conjointement par sa supérieure hiérarchique directe, à savoir la première adjointe de sa commune en charge de l’école et du service périscolaire, mais aussi par le maire. En défense, la commune soutenait que cet entretien aurait été exclusivement mené par la supérieure directe de la requérante. “Il ne ressort néanmoins pas des pièces du dossier une absence de participation du maire au processus d’entretien professionnel en litige, à raison de la présence de celui-ci durant l’entretien d’une part”, est-il écrit dans le jugement du tribunal administratif.

Par ailleurs, le compte rendu de cet entretien retrace des échanges entre la fonctionnaire évaluée et sa hiérarchie “à la première personne du pluriel” avec des mentions telles que : “elle nous informe”, “elle nous dit”, “nous vous précisons”. Ce document avait aussi été conjointement signé par la première adjointe et par le maire, lequel ne s’est donc pas contenté de viser ce compte rendu.

Privation de garanties

La commune faisait également valoir que le maire avait tenu à être présent aux côtés de sa première adjointe “afin de ne pas la laisser seule face l’agente, à raison d’accusations de harcèlement portées par la requérante à l’encontre de sa hiérarchie”. Mais les juges estiment que “pour délicate que soit la situation managériale en cause, (…) la commune n’invoque pas de circonstances faisant obstacle à ce que cette supérieure hiérarchique s'acquitte sans intervention de l’autorité territoriale de l’évaluation professionnelle de l’agente placée sous son autorité directe”. Pour le tribunal, l’entretien d'évaluation de la requérante a donc été “réalisé dans des conditions irrégulières”.

Selon les juges, cette irrégularité aurait ainsi privé l’intéressée “des garanties associées au cadre légal et réglementaire applicable tenant au caractère contradictoire de la procédure d’établissement des comptes rendus d’entretien professionnel”. Le tribunal administratif de Melun annule donc le compte rendu de l’évaluation professionnelle de la requérante et enjoint à sa commune de procéder à une nouvelle évaluation professionnelle de cette dernière

26 septembre 2024
Bastien Scordia 
pour ACTEURS PUBLICS