Le congé bonifié concerne les fonctionnaires territoriaux originaires d’outre-mer et affectés en métropole. Le régime juridique de ce congé a été réformé en 2020, dans sa durée et sa fréquence notamment. Le point en 10 questions.

01 – En quoi le « nouveau » congé bonifié consiste-t-il ?

Quasiment inchangé depuis 1978, le dispositif du congé bonifié a été profondément réformé en 2020, à la suite des Assises des outre-mer qui se sont tenues en 2018. Le décret du 2 juillet 2020 a ainsi entendu moderniser les règles applicables afin que les agents en bénéficient plus fréquemment, tout en répondant aux enjeux d’efficacité et de continuité des services publics (1).

Les modalités de mise en œuvre de ce dispositif sont définies par les décrets du 15 février 1988 et du 20 mars 1978 (art. 1er à 11) modifiés.

Le congé bonifié permet aux fonctionnaires concernés de bénéficier de la prise en charge des frais de voyage entre la métropole et la collectivité d’outre-mer dont ils sont originaires (lire la question n°5) et d’une indemnité de cherté de la vie pendant la durée du congé. Il s’agit d’un complément de rémunération dont le montant varie selon le lieu de congé (lire la question n°6).

02 – Quels sont les avantages attachés au congé bonifié ?

Ce congé est destiné en principe aux fonctionnaires territoriaux originaires d’outre-mer et affectés en métropole. Aux termes du code général de la fonction publique (CGFP, art. L651-1), les fonctionnaires territoriaux dont le centre des intérêts matériels et moraux (lire la question n°8) est situé en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou à Saint-Pierre-et-­Miquelon, exerçant leurs fonctions sur le territoire européen de la France bénéficient du régime de congé bonifié institué pour les fonctionnaires de l’Etat dans la même situation.

Les agents contractuels territoriaux et les agents des collectivités du Pacifique et de la Nouvelle-Calédonie en fonction sur le territoire européen de la France sont exclus du dispositif du congé bonifié. Ne peuvent non plus en bénéficier les agents territoriaux qui exercent leurs fonctions outre-mer, mais sont originaires du territoire européen de la France.

Enfin, pour l’application des dispositions relatives au congé bonifié, la ­Guadeloupe, la ­Martinique, Saint ­Barthélemy et Saint-­Martin sont considérés comme formant une même collectivité.

03 – Quelles sont les conditions pour bénéficier d’un congé bonifié ?

Pour bénéficier d’un congé bonifié, le fonctionnaire territorial doit remplir deux conditions.

Tout d’abord, il doit justifier d’une durée minimale de service ininterrompue de vingt-quatre mois, au lieu de trente-six mois auparavant (décret n°78-399, art. 9 ; lire la question n°4). Les différents congés, à l’exception toutefois des congés de longue durée, et les périodes de stage d’enseignement ou de perfectionnement n’interrompent pas la durée de service prise en compte pour ­l’ouverture du droit à congé bonifié (décret n°88-168, art. 3).

Par ailleurs, le fonctionnaire territorial doit exercer ses fonctions en métropole et justifier que le centre de ses intérêts moraux et matériels est situé en ­Guadeloupe, en Guyane, à la ­Martinique, à La Réunion, à ­Mayotte, à Saint-­Barthélemy, à Saint-­Martin ou à Saint-­Pierre-et-­Miquelon (lire la question n°8).

04 – Quelles sont la durée et la fréquence du congé bonifié ?

Pour avoir vocation à bénéficier d’un congé bonifié, le fonctionnaire doit justifier d’une durée minimale de service ininterrompue de vingt-quatre mois, au lieu de trente-six mois auparavant (décret n°78-399, art. 9). Autrement dit, l’agent a désormais droit à un congé bonifié tous les deux ans en principe, au lieu de tous les trois ans auparavant. On notera que la durée du congé bonifié est incluse dans cette durée minimale de vingt-quatre mois (décret n°78-399, art. 10).

FOCUS

  • En contrepartie de l’augmentation de la fréquence d’octroi du congé bonifié, la bonification de trente jours des congés annuels est supprimée. 

La durée du congé bonifié est désormais déterminée dans la limite de 31 jours consécutifs (samedis, dimanches et jours fériés inclus), auxquels peuvent s’ajouter des délais de route.

05 – Comment les frais de voyage sont-ils pris en charge ?

Dans le cadre d’un congé bonifié, les frais de transport sont intégralement pris en charge pour l’agent bénéficiaire et pour chaque enfant à charge au sens de la législation sur les prestations familiales. Pour le conjoint (concubin ou partenaire d’un pacte civil de solidarité, Pacs).

La prise en charge est intégrale également si les revenus de celui-ci n’excèdent pas 18 552 euros (arrêté du 2 juillet 2020, art. 1 décret n°78-399, art. 5). Le montant annuel des revenus pris en compte correspond au revenu fiscal de référence de l’année civile précédant l­’ouverture du droit à congé bonifié de l’agent bénéficiaire (par exemple, c’est le revenu fiscal de référence de l’année N pour un droit à congé bonifié ouvert en N +1).

Pour bénéficier de la prise en charge des frais de transport, il n’est pas nécessaire que l’agent et ses enfants ou son conjoint (concubin ou partenaire de Pacs) ait lieu en partie ou en totalité à la même date. En revanche, la prise en charge des frais de transport s’entend des frais de voyage aller-retour de l’aéroport international d’embarquement à l’aéroport international de débarquement. Les frais de transport sur place ne sont pas pris en charge (ni en outre-mer, ni en métropole par exemple pour se rendre à l’aéroport et en revenir).

Enfin, les frais de bagages sont pris en charge dans la limite de 40 kilogrammes par personne. Les excédents sont pris en charge si le poids total des bagages ne dépasse pas 40 kilos par personne.

06 – Qu’appelle-t-on l’indemnité de vie chère ?

Pendant le congé bonifié, l’agent continue de percevoir les différents éléments composant sa rémunération, notamment son traitement indiciaire et, le cas échéant, la nouvelle bonification indiciaire (NBI), le supplément familial de traitement (SFT), ses primes et indemnités. Le congé bonifié lui permet également de bénéficier d’une majoration du traitement, variable en fonction du département ou de la collectivité où se déroule le congé. Cette majoration est désignée comme une « indemnité de vie chère ». Par exemple, pour la Guyane, ­la Guadeloupe, la Martinique, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, cette majoration est de 40 % du traitement indiciaire, elle est de 35 % à La Réunion et de 108 % en ­Polynésie française.

07 – Qu’en est-il pour les couples de fonctionnaires ?

Dans le cas d’un ménage de fonctionnaires, où chaque conjoint a, la même année, droit à un voyage de congé bonifié vers des destinations différentes, les deux agents peuvent opter pour l’une ou l’autre des destinations. Si, pour une même destination, les agents ne bénéficient pas de congés bonifiés à des périodicités identiques, ils ne peuvent réclamer le bénéfice d’un alignement sur la périodicité la plus favorable. Les dispositions prévues en matière de report pourront permettre de faire coïncider les dates de départ si les agents le souhaitent.

Enfin, la prise en charge des frais de transport du conjoint (concubin ou partenaire de Pacs) est possible sous condition (lire la question n°5).

08 – Que recouvre la notion de centre des intérêts moraux et matériels ?

Parmi les conditions requises pour bénéficier d’un congé bonifié, le fonctionnaire territorial qui exerce ses fonctions en métropole doit justifier que le centre de ses intérêts moraux et matériels est situé en Guadeloupe, en Guyane, à la ­Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-­­Barthélemy, à Saint-­Martin ou à Saint-Pierre-et-­Miquelon (lire la question n°3). Si tel est le cas, c’est là où l’agent prendra son congé bonifié.

L’intéressé peut apporter la preuve de la localisation du centre des intérêts moraux et matériels par tous moyens (quittance de loyer, facture EDF, certificat de scolarité…). L’employeur appréciera cette condition sur la base d’un faisceau ­d’indices. Reprenant notamment les apports jurisprudentiels en la matière, le « Guide des congés bonifiés » (lire encadré « Références ») édité par la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) en fournit une liste non exhaustive :

  • le domicile de la famille proche de l’agent ;

  • le lieu d’implantation des biens fonciers dont il est propriétaire ou locataire ;

  • le domicile avant l’entrée de l’agent dans l’administration ;

  • la fréquence des voyages qu’il a pu effectuer vers le territoire considéré ;

  • le lieu de naissance des enfants ;

  • les études effectuées sur le territoire considéré par l’agent et/ou ses enfants.

Ces critères ne sont pas nécessairement ­cumulatifs et plusieurs d’entre eux qui ne seraient pas à eux seuls déterminants, peuvent se combiner, sous le contrôle de la juridiction compétente, selon les ­circonstances propres à chaque espèce (2). Aucun des critères précédents ne peut être individuellement considéré comme obligatoire. Le principe est d’apprécier la vocation de l’agent demandeur à bénéficier du droit à congé bonifié sur la base d’un tel faisceau d’indices : l’absence de tel ou tel critère ne doit pas conduire à refuser le congé ­bonifié (cf. le guide « DGAFP »).

09 – A qui le fonctionnaire doit-il adresser sa demande de congé bonifié ?

L’article 2 du décret du 15 février 1988 précise que le fonctionnaire doit présenter sa demande de congé bonifié à l’autorité territoriale dont il relève. Si les conditions légales sont remplies, l’autorité territoriale lui accorde le bénéfice du congé bonifié. La collectivité prend alors financièrement en charge le congé, c’est-à-dire les frais de voyage et le supplément de rémunération correspondant. La reconnaissance, par l’administration, de l’implantation du centre des intérêts moraux et matériels d’un fonctionnaire dans un territoire ultramarin est valable six ans, à charge pour l’intéressé de faire connaître à son employeur tout changement de situation.

10 – Que se passe-t-il en cas de refus de l’employeur ?

En cas de refus de congé bonifié, l’employeur doit motiver sa décision. L’intéressé peut renouveler sa demande tous les ans, s’il le souhaite. Il peut également contester ce refus dans les deux mois suivant sa notification, soit dans le cadre d’un recours administratif (gracieux ou hiérarchique), soit devant la juridiction administrative.

14 décembre 2022
La Gazette des Communes