Tout comité confédéral national de FO se tient forcément dans un contexte, national et international… Le CCN des 9 et 10 avril, particulièrement. C’est en effet sur fond d’une situation internationale faite de guerres qui perdurent et d’un vent de panique qui secoue les économies mondiales depuis la décision des États-Unis d’une nouvelle politique douanière, que s’est ouverte l’instance de FO. À la tribune, au fil d’une cinquantaine d’interventions, les délégués des unions départementales et des fédérations ont évoqué ce contexte très préoccupant et qui a ses incidences sur le plan national. Dans une économie déjà fragilisée et tandis que la vague de plans sociaux ne retombe pas, l’exécutif prévoit ― notamment au nom du réarmement ― d’infliger des efforts toujours plus rudes aux finances publiques, cela par la réduction des dépenses. Ce qui ne peut qu’impacter encore les plus modestes. Rappelant dans sa résolution générale, adoptée à une quasi unanimité, que la redistribution des richesses est impérative, le parlement de FO a souligné son attachement au modèle social et son refus de politiques d’austérité qui mettraient encore à mal l’emploi, les salaires, les retraites, les services publics ou encore la Sécurité sociale, laquelle célèbre cette année ses 80 ans. La négociation collective est un levier essentiel au niveau national, dans les branches et dans les entreprises, rappelle aussi FO qui demande toujours l’abrogation de la réforme des retraites de 2023 ou encore l’ouverture d’une négociation interprofessionnelle, entre autres sur le taux d’emploi. Pour faire aboutir ses revendications et œuvrer plus largement encore à la défense des droits des travailleurs, FO va poursuivre son travail de développement. Faire entendre sa voix passera aussi notamment, a décidé le CCN, par une forte mobilisation de toutes ses structures le 1er Mai.
U ne actualité très dense a animé ce Comité confédéral national de FO, qui se tenait les 9 et 10 avril au siège de la confédération à Paris. Une actualité d’une part propre à FO avec l’expression ― notamment celle du secrétaire général, Frédéric Souillot ―, de la nécessité de conforter encore l’organisation en poursuivant un travail de développement et avec le souci de sensibiliser plus avant les cadres et agents de maîtrise.
Ce CCN a eu bien sûr toute sa dimension revendicative. Au fil de cinquante et une interventions à la tribune ou encore de la résolution générale, adoptée à une très large majorité, les membres de l’instance ont réaffirmé les demandes : hausse des salaires avec mise en place d’une échelle mobile, hausse des pensions et des minima sociaux, retour à un financement de la Sécu par les cotisations, mise en place d’une conditionnalité des aides publiques accordées aux entreprises, engagement d’une vraie politique de l’emploi, ouverture d’une négociation interprofessionnelle, notamment sur le taux d’emploi, abrogation de la réforme des retraites de 2023 et opposition à un régime universel par points ainsi qu’à un régime par capitalisation… Des revendications d’autant plus fortement exprimées que le contexte, national et international, inquiète les travailleurs et qu’ils s’opposent à de nouvelles attaques contre leurs droits.
Le refus d’un surplus d’austérité
La guerre commerciale initiée par les États-Unis menace ainsi d’impacter les emplois en France dans de nombreuses filières. L’objectif confirmé par le gouvernement d’une réduction encore plus forte des dépenses publiques, pour un déficit public ramené à 3 % du PIB en 2029, nourrit aussi les inquiétudes concernant les choix budgétaires et de politiques publiques. D’autant que s’ajoute désormais le contexte du réarmement, décidé par l’exécutif et interrogeant sur son financement. Concentrer les efforts sur la défense au détriment des dépenses sociales et des services publics ne ferait qu’accentuer la colère dans une société déjà fracturée, soulignait Frédéric Souillot.
Les nouvelles priorités budgétaires ne doivent en aucun cas conduire à plus d’austérité , les moyens, indiquait le secrétaire général, peuvent être trouvés ailleurs, du côté de la manne des aides publiques aux entreprises, sans contrôle ni conditions, dans la lutte contre l’évasion fiscale ou dans la taxation des dividendes.
On s’oppose à ce que le réarmement remette en cause les droits sociaux, appuyait Valéry Michel, pour FO-Défense, comme de nombreux militants. Il s’agirait de faire payer le plus grand nombre. (…) Alors qu’il y a en France 11 millions de pauvres !, s’indignait Grégoire Hamelin (UD Indre-et-Loire). Notant l’annonce, ce 9 avril par la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, d’une économie supplémentaire de 5 milliards d’euros sur 2025, Pascaline Kerhouas (FO-Finances) indiquait : La solution [pour les finances publiques, NDLR] n’est pas dans la réduction des dépenses. Il faut mettre en œuvre une réforme fiscale globale et revoir les exonérations de cotisations [aux entreprises, NDLR].
Revenir sur le terrain de la négociation collective
Actuellement, l’offensive sur le si généreux modèle social français trouve un regain de vitalité, avec pour idée centrale que les Français ne travailleraient pas assez, notait le secrétaire général, et la tentation est grande, notamment du côté du patronat, de se saisir de l’occasion pour pousser des mesures restrictives, pour ne pas dire provocatrices, sur les retraites ou la durée du travail. De son augmentation à la remise en cause du mécanisme de calcul des pensions en passant par la question de leur imposition, le relèvement de l’âge légal de départ en retraite, l’évocation d’un système de capitalisation pour les retraites… Les mauvaises idées pleuvent. Le gouvernement, quant à lui, a cadenassé la concertation lancée sur les retraites et prétendant revisiter la réforme de 2023. La méthode proposée visait (…) à nous associer au maintien de la réforme actuelle, au statu quo sur les 64 ans ou à l’introduction de la capitalisation, que nous rejetons, a rappelé Frédéric Souillot. FO a refusé d’être instrumentalisée et a donc quitté les discussions dès le 27 février. Pour FO, il faut au plus vite revenir sur le terrain qui est le nôtre [en tant qu’organisation syndicale, NDLR], le L1 du Code du travail, celui de la négociation collective.
La confédération, qui vise actuellement l’ouverture d’une négociation interprofessionnelle – sur les fins de carrière, les reconversions, la pénibilité –, a d’ores et déjà été entendue.
Des discussions vont s’ouvrir, a indiqué le ministère du Travail. Seront abordées d’abord les problématiques de la reconversion et de la transition professionnelles.
Pour obtenir satisfaction sur son cahier de revendications, le CCN a décidé d’une forte mobilisation de toutes ses structures le 1er Mai.
FO réaffirme son attachement à la Sécu, qui fête ses 80 ans
L a Sécurité sociale, qui fête cette année ses 80 ans, est la cible de multiples attaques. Plusieurs intervenants ont rappelé à la tribune leur attachement à cette vieille dame de 80 ans, moderne amortisseuse de toutes les crises. Ils ont insisté sur l’importance d’une Sécu financée par les seules cotisations sociales, le salaire différé, pour respecter le principe fondamental selon lequel chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.
Désormais, ces cotisations ne financent plus que 49 % des régimes de base. La part manquante, due aux exonérations de cotisations patronales, est complétée par l’impôt. Mais la compensation de ces exonérations par l’État n’est que partielle. En 2023, le manque à gagner pour la Sécu était de 19 milliards d’euros, soit une perte de recettes supérieure à son déficit cumulé.
Dans sa résolution, le CCN réaffirme son attachement à notre modèle de protection sociale collective qui a montré, crise après crise (sanitaire ou économique), son rôle protecteur. Il exige la fin des exonérations et le retour à un financement de la Sécurité sociale s’appuyant sur la cotisation, à la hauteur des besoins des assurés. Il condamne les lois de finances et de financement de la Sécurité sociale de 2025, qui continuent de considérer le service public et ses agents comme une variable d’ajustement budgétaire.
Alerte sur une austérité à bas bruit
Seule la cotisation ouvre des droits, tandis que les recettes nées de l’impôt n’ont pas de fléchage et peuvent être orientées selon les choix politiques. Actuellement, ont indiqué encore des militants lors de ce CCN, l’exécutif met sur le même plan le financement de l’économie de guerre et celui du social. Le niveau de prestations sociales est revu à la baisse. La loi de financement de la Sécu réduit déjà le plafond des indemnités journalières de 1,8 à 1,4 Smic, a ainsi alerté Frédéric Souillot. Le montant maximal des indemnités journalières est passé de 53,31 euros brut par jour à 41,47 euros pour les arrêts de travail prescrits depuis le 1er avril 2025. Devant le CCN, un militant a également évoqué la mobilisation récente des camarades de la Sécurité sociale, notamment contre le projet de suppression du service du contrôle médical. Une sécurité sociale où FO est désormais la première organisation syndicale au sein des organismes du régime général.
Pour FO, les nouvelles priorités budgétaires ne doivent en aucun cas conduire à plus d’austérité pour des politiques aussi essentielles que l’enseignement, la santé, la sécurité sociale, la solidarité ou les droits sociaux, a pointé Frédéric Souillot, alertant sur une austérité à bas bruit qui se déploie partout.
18 avril 2025
Clarisse JOSSELIN
Journaliste à l’InFO militante